Une société, titulaire de deux lots d’un marché de travaux pour la construction d’un gymnase, a demandé au juge des référés le versement d’une provision de 179 298,55 € TTC en règlement du solde de ces deux lots.
Ayant adressé un courrier intitulé « Facturation DGD » au maître d’œuvre, elle soutenait que ces sommes résultaient d’un décompte général et définitif tacite (DGD tacite).
Que dit le Conseil d’État ?
Le Conseil d’État rappelle que, pour se prévaloir d’un décompte général et définitif tacite, il faut respecter la procédure décrite par le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux de 2009 (CCAG Travaux 2009), applicable en l’espèce (procédure recodifiée aux articles 12.3 et 12.4 du CCAG Travaux 2021).
Précisément :
- Étape 1 : Après l’achèvement des travaux, le titulaire établit le projet de décompte final (article 13.3.1 CCAG Travaux 2009).
- Étape 2 : Le titulaire transmet son projet de décompte final, simultanément au maître d’œuvre et au représentant du pouvoir adjudicateur, par tout moyen permettant de donner date certaine, dans un délai de trente jours à compter de la notification de la décision de réception des travaux (article 13.3.2 CCAG Travaux 2009).
- Étape 3 : Le maître d’œuvre accepte ou rectifie le projet de décompte final établi par le titulaire. Le projet accepté ou rectifié devient alors le décompte final (article 13.3.3 CCAG Travaux 2009).
- Étape 4 : Le représentant du pouvoir adjudicateur signe le projet de décompte général et le notifie au titulaire dans un délai de trente jours à compter de la réception de la demande de paiement finale (article 13.4.2 CCAG-Travaux 2009).
Ainsi, pour se prévaloir d’un décompte général et définitif tacite, il faut, à partir de la notification d’un projet de décompte par le titulaire, plusieurs inerties de l’acheteur (article 13.4.4 CCAG Travaux 2009) :
- Première inertie : Si le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas le décompte général dans les 30 jours, le titulaire notifie un projet de décompte général signé, composé du projet de décompte final et du projet d’état du solde hors révision de prix définitive.
- Deuxième inertie : Si, dans les dix jours suivant cette transmission, le représentant du pouvoir adjudicateur ne notifie pas le décompte général, le projet de décompte général transmis par le titulaire devient le décompte général et définitif.
Le courrier « Facturation DGD » peut-il être considéré comme un projet de décompte au sens du CCAG-Travaux ?
Le Conseil d’État rappelle qu’un décompte général et définitif tacite ne peut naître que si le titulaire a préalablement transmis un projet de décompte final au maître d’œuvre.
Dans l’affaire jugée, le Conseil d’État a considéré que le courrier intitulé « Facturation DGD » ne revêtait pas le caractère d’un projet de décompte final.
Dès lors, le délai de 30 jours de notification du décompte par le pouvoir adjudicateur n’ayant pas commencé à courir, la société ne pouvait se prévaloir de l’existence d’un décompte général et définitif tacite :
« Il résulte toutefois de l’instruction que la société X n’a adressé à la société Z, maître d’œuvre, qu’un courrier le 18 août 2023 intitulé « Facturation DGD », qui ne revêtait pas le caractère d’un projet de décompte final. Par suite, elle ne peut être regardée comme lui ayant transmis un tel projet. Dans ces conditions, le délai prévu à l’article 13.4.2 n’ayant pas couru, elle ne peut se prévaloir de l’existence d’un décompte général et définitif tacite. »
Attention : le contenu du projet de décompte final et ses modalités de transmission doivent être conformes aux prescriptions du CCAG Travaux. À défaut, la procédure ne peut pas être enclenchée, même si l’administration reste inactive au-delà du délai de 30 jours prévu.
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