Source : Ordonnance n° 2025-979 du 14 octobre 2025
(JO du 15 octobre 2025 — transposition des articles 7, 26 et 27 de la directive (UE) 2023/1791)
Une directive européenne ambitieuse pour la sobriété énergétique
Adoptée le 13 septembre 2023, la directive (UE) 2023/1791 vise à renforcer la contribution des États membres à la réduction des consommations d’énergie et à la neutralité climatique de l’Union. Elle impose notamment une prise en compte accrue de l’efficacité et de la sobriété énergétiques dans les politiques publiques, en particulier dans la commande publique et la gestion des réseaux énergétiques.
L’ordonnance n° 2025-979 du 14 octobre 2025, publiée au Journal officiel du 15 octobre, parachève la transposition de cette directive en droit français. Elle s’articule autour de trois grands axes : la commande publique, les réseaux de chaleur et de froid, et les missions des autorités de régulation et gestionnaires d’énergie.
- La commande publique à l’heure de la performance énergétique
L’un des apports majeurs du texte réside dans la modification des codes de la commande publique (CCP) et de l’énergie, désormais porteur d’exigences environnementales renforcées.
➤ Une obligation d’achat « haute performance »
Pour les marchés publics et concessions dont la valeur excède les seuils européens, les acheteurs publics et autorités concédantes doivent désormais acquérir exclusivement des produits, services, bâtiments et travaux à haute performance énergétique.
Cette obligation s’étend également aux acquisitions ou prises à bail d’immeubles, sauf exception tenant à la sécurité publique ou à des contraintes techniques insurmontables.
➤ La promotion des contrats de performance énergétique
Autre évolution notable : l’introduction d’un article L.234-2 au sein du code de l’énergie.
Celui-ci prévoit que, lorsqu’ils passent des marchés de services destinés à améliorer l’efficacité énergétique, les acheteurs et autorités concédantes doivent examiner la faisabilité de conclure un contrat de performance énergétique (CPE) à long terme. Ces contrats, conçus pour garantir des économies d’énergie mesurables et durables, visent à encourager les partenariats publics-privés dans une logique de résultat plutôt que de moyens. Ils traduisent la volonté du législateur européen et national d’ancrer l’efficacité énergétique dans la durée, au-delà de la simple exigence de performance technique initiale.
- Les modalités d’application de ces dispositions seront fixées par décret.
➤ Une nouvelle approche de la définition du besoin
Les articles L.2111-1 et L.3111-1 du CCP ont été modifiés : la définition du besoin doit intégrer la prise en compte de l’efficacité et de la sobriété énergétiques, au même titre que les objectifs de développement durable dans leurs dimensions économique, sociale et environnementale.
Application immédiate : ces nouvelles règles s’appliquent à toute consultation engagée ou publiée à compter du 18 octobre 2025.
- Réseaux de chaleur et de froid : un cadre modernisé
L’ordonnance étend les dispositions existantes relatives aux réseaux de chaleur aux réseaux de froid, en actualisant leurs critères d’efficacité.
Désormais, l’efficacité d’un réseau se mesure à la part de chaleur ou de froid issue d’énergies renouvelables ou de récupération.
La chaleur produite par des pompes à chaleur est assimilée à une énergie renouvelable sous conditions techniques.
Autre innovation : en cas de non-conformité aux nouveaux critères, un plan d’amélioration devra être élaboré. Enfin, la réforme consacre le gel de toute augmentation de l’usage de combustibles fossiles (hors gaz naturel, toléré jusqu’en 2030).
- Gestionnaires et régulateurs : l’efficacité énergétique comme mission
Les gestionnaires des réseaux de transport et de distribution d’électricité et de gaz voient leurs missions élargies : ils doivent désormais intégrer les objectifs d’efficacité et de sobriété énergétiques dans la conduite et la planification de leurs activités, sans création d’obligations nouvelles mais avec une responsabilisation accrue.
La Commission de régulation de l’énergie (CRE) se voit, elle aussi, confier une mission d’évaluation et de prise en compte de ces objectifs dans le cadre de la régulation des réseaux.
- Une réforme à fort impact opérationnel
Cette ordonnance consacre une approche intégrée de la transition énergétique dans la sphère publique.
Pour les acheteurs, elle implique une révision rapide des cahiers des charges, des grilles de critères techniques et des procédures d’évaluation des offres.
Pour les opérateurs économiques, elle impose d’anticiper la démonstration de la performance énergétique de leurs produits et services.
Enfin, pour les collectivités et autorités concédantes, elle ouvre la voie à une politique d’achat exemplaire, alignée sur les objectifs nationaux et européens de neutralité carbone.