Dans une récente décision, le Tribunal administratif de Nîmes apporte un éclairage précieux sur la question de la modification des offres dans le cadre d’une procédure de marché public.
Pour rappel, le principe général en droit de la commande publique est clair : une fois qu’une offre est remise, elle devient intangible. Cela signifie qu’elle ne peut plus être modifiée de manière substantielle, sauf pour corriger une erreur purement matérielle, c’est-à-dire une erreur manifeste, sans incidence significative sur l’offre initiale.
Dans l’affaire jugée, la Communauté de communes de Petite Camargue avait lancé un marché public de travaux pour la construction d’une cuisine centrale intercommunale. Un litige est survenu lorsqu’un candidat a présenté une offre particulièrement attractive : son prix était inférieur de 28 % à l’estimation de la collectivité et de 23 % à celui du candidat finalement retenu.
Soupçonnant une anomalie, l’acheteur public a demandé des précisions, notamment sur les quantités des métrés des cloisons, car celles-ci semblaient sous-évaluées par rapport aux estimations du maître d’œuvre. Dans cette demande, la collectivité avait clairement précisé au soumissionnaire qu’il ne devait en aucun cas modifier les caractéristiques substantielles de son offre, notamment les quantités et le montant global.
Malgré ces consignes explicites, le candidat a reconnu avoir oublié d’intégrer 100 mètres carrés de surface dans son bordereau de prix (DPGF). Il a donc ajouté cette quantité manquante tout en conservant le même prix global.
La collectivité a estimé que cette correction constituait une modification irrégulière et a rejeté l’offre pour ce motif précis, sans invoquer directement la notion d’offre anormalement basse. Contestant cette décision, le candidat a saisi le juge administratif.
Le Tribunal administratif de Nîmes a confirmé la position de la collectivité en rappelant fermement que la modification opérée constituait une violation manifeste du principe d’intangibilité de l’offre. Selon le tribunal, la rectification d’une erreur matérielle ne peut pas conduire à une modification substantielle des caractéristiques initiales de l’offre. Or, en ajoutant 100 mètres carrés, le candidat avait modifié de façon significative les quantités chiffrées, ce qui allait au-delà d’une simple correction technique.
La demande de précision adressée par la communauté de communes, bien que visant à obtenir des explications sur l’anomalie du prix, ne devait pas conduire à une modification substantielle de l’offre. En acceptant cette modification, la collectivité aurait violé ses propres exigences, ce qui aurait pu entraîner une irrégularité dans l’attribution du marché.
En résumé : attention à bien distinguer correction d’erreurs matérielles et modification substantielle, car les frontières sont strictes et les conséquences lourdes.
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