Le Tribunal administratif de Montreuil (4 novembre 2024) livre une analyse détaillée des conditions permettant de modifier un marché public sans remise en concurrence préalable.
De quoi parlons-nous ?
Il s’agit des conditions dans lesquelles un avenant à un contrat de la commande publique peut être signé sans remise en concurrence, notamment sur le fondement des prestations supplémentaires, des circonstances imprévues ou d’une modification non substantielle (respectivement articles R.2194-2, R.2194-5 et R.2194-7 du Code de la commande publique).
Quelle est l’histoire ?
Dans cette affaire, la validité de deux avenants signés le 20 décembre 2022 entre la commune de Noisy-le-Sec et la société Atacama pour la maintenance des photocopieurs est contestée.
Il est soulevé notamment que :
- Ces avenants ont été signés par une personne incompétente ;
- L’augmentation du montant du marché (de 50 % puis de 1,2 %) ne respectait pas les règles de la commande publique ;
- Aucune circonstance imprévisible ne justifiait cette hausse ;
- Il existait un risque de favoritisme, car l’actionnaire principal d’Atacama est lié au maire.
La commune, en défense, soutient que ces avenants étaient justifiés par :
- L’augmentation imprévisible des coûts des matières premières (circonstance imprévue, article R.2194-5 du CCP) ;
- L’accroissement du nombre de photocopieurs à maintenir (prestations supplémentaires, article R.2194-2 du CCP).
Qu’en pense le tribunal administratif ?
Le tribunal, après analyse, conclut que les avenants sont irréguliers, car ils ne respectent pas les conditions légales pour modifier un marché sans mise en concurrence :
- Pour les prestations supplémentaires :
- Absence de justifications démontrant l’impossibilité de recourir à un autre prestataire.
- L’argument avancé par la commune sur l’efficience de se tourner vers le titulaire ne suffit pas.
- Pour la circonstance imprévue :
- Un simple courrier du titulaire actant une augmentation de ses tarifs est insuffisant pour caractériser une circonstance imprévue.
- Il ne démontre ni l’incidence de ces hausses de prix sur le marché ni l’ampleur des coûts supportés par le titulaire.
- L’augmentation du montant du marché (plus de 50 %) est substantielle (article R.2194-7 du CCP) et nécessite une nouvelle procédure de mise en concurrence.
- Les délais imposés par une nouvelle procédure ne justifient pas non plus d’avenanter le marché sans remise en concurrence.
Cependant…
Le tribunal rejette la demande d’annulation des avenants. Il souligne que l’irrégularité ne justifie pas leur annulation totale, en l’absence de :
- Vice grave affectant le consentement ;
- Contenu illicite ;
- Favoritisme prouvé.
De plus, l’accord-cadre ayant expiré, les conclusions concernant la résiliation sont devenues sans objet.
Pour en savoir suivez le lien : Tribunal administratif de Montreuil, 4 novembre 2024, n°2301478